Par Eolia BUSATA et Henri LEBEN, avocats à la Cour
Le Digital Services Act (Règlement UE n°2022/2065 – DSA) a vocation à réguler les services en ligne au sein de l’Union européenne, en luttant contre les contenus illicites et en renforçant les obligations de contrôle interne des plateformes.
Le calendrier d’application du règlement est étendu, les premières mesures sont entrées en vigueur en novembre et d’autres suivront, jusqu’au 17 février 2024, date à laquelle l’ensemble des dispositions du Règlement seront applicables.
Le Règlement s’applique à tout intermédiaire ou fournisseur de services en ligne offrant ses services et produits sur le marché de l’UE, indépendamment de sa localisation géographique. Les entités concernées sont, notamment, les fournisseurs de services d’informatique en Cloud et d’accès à un Internet et la plupart des lieux d’achat et de vente en ligne (places de marché, boutiques d’application, réseaux sociaux, plateformes de voyage et d’hébergement, etc.).
Un statut particulier est conféré aux très grands opérateurs ayant un nombre mensuel moyen de destinataires actifs dans l’UE égal ou supérieur à 45 millions. Ce nombre pourra être réévalué en cas d’évolution de la population de l’Union de 5%.
Les très petites et petites entreprises (moins de 50 salariés et moins de 10 millions de CA annuel) qui n’atteignent pas 45 millions d’utilisateurs mensuels seront exemptées de certaines obligations.
Toutes les entreprises concernées devront désigner un point de contact unique (et un représentant légal pour les entités établies hors UE).
Le Règlement contient plusieurs obligations dont les principales sont :
• La lutte contre les contenus illicites : plusieurs mesures doivent être prévues dont la mise en place d’un outil permettant de signaler facilement les contenus illicites, mais également l’obligation pour les marketplaces de mieux s’informer sur leurs vendeurs (vérification de leur fiabilité, de leur identité, etc.),
Le règlement prévoit à ce titre la création du statut de « signaleurs de confiance » / « Trusted flaggers », c’est-à-dire, des entités reconnues pour leur expertise dans la détection et l’identification de contenus illicites, et leur indépendance. Elles seront désignées dans chaque Etat et leurs signalements devront être traités en priorité.
Un rapport annuel récapitulant leurs actions est à adresser au coordinateur national les ayant désignés.
• Transparence : les plateformes devront mettre en place un système interne de traitement des réclamations des utilisateurs (notamment dans les cas de suspension ou de résiliation des comptes sur les plateformes) et clarifier le fonctionnement des algorithmes utilisés pour recommander les contenus publicitaires.
Ce second point s’accompagne d’interdictions spécifiques : interdiction de la publicité ciblée à destination des mineurs, ou de celle basée sur des données sensibles, sauf consentement exprès des personnes.
Les très grandes plateformes, et les très grands moteurs de recherche, sont soumis à des obligations supplémentaires, y compris :
• La mise en place d’un système de recommandation de contenus non-fondé sur le profilage et d’un registre des publicités contenant diverses informations (qui a parrainé l’annonce, comment et pourquoi celle-ci cible tels individus…) ;
• Une obligation d’analyser annuellement les risques systémiques qu’elles créent (sur la haine et la violence en ligne, les droits fondamentaux, les processus électoraux, la santé publique…) et de prendre les mesures nécessaires pour atténuer ces risques (respect de codes de conduite, suppression des faux comptes, etc.) ;
• La réalisation d’audits annuels indépendants de réduction des risques, sous le contrôle de la Commission européenne.
Le contrôle de l’application du Règlement est confié, dans chaque Etat, à un « coordinateur des services numériques », rassemblés au niveau de l’UE dans un Comité européen des services numériques. Ces coordinateurs devront être déclarés au plus tard le 17 février 2024.
En France, cette mission est confiée à l’Arcom.
En cas de violation du règlement, les coordinateurs des services numériques et la Commission pourront prononcer des astreintes et des sanctions. Pour les très grandes plateformes et les très grands moteurs de recherche, la Commission pourra infliger des amendes pouvant aller jusqu’à 6% de leur chiffre d’affaires mondial.
En cas de violations graves et répétées au règlement, des interdictions d’activités sur le marché de l’UE pourront être prononcées.
De manière générale, le règlement a vocation à s’adapter à la taille et aux conséquences éventuelles de l’activité de l’entreprise sur le marché de l’UE.
En fonction de votre activité, une analyse au cas par cas des mesures qui vous sont applicables est donc nécessaire.
Pour faire le point avec nos équipes sur les obligations applicables à votre entreprise, c’est ici. (https://www.leben-avocats.com/contact/)